Les charognards ne sont pas repus Plus d’un demi-siècle après son élimination physique par le Clan d’Oujda, des charognards continuent de s’acharner sur la mémoire de Abane Ramdane,cet homme d’exception dont le tort principal était moins le fait de surpasser tous les hommes de sa génération dans la conduite de la guerre de libération nationale agérienne que celui d’avoir certaines origines. En effet, s’il n’était pas Kabyle, y aurai-il eu, honnêtement, autant de tentatatives à ternir l’image du fondateur de l’Etat algérien par des hommes du pouvoir de ce même Etat? Assurément non ! D’Est et d’Ouest, les tenants du courant arabo-baâthiste et leurs héritiers actuels, se donnent pour mission aujourd’hui de saccager la mémoire du plus illustre père de l’indépendance de l’Algérie.
Abane Ramdane n’était pourtant pas seul dans l’organisation du Congrès de la Soummam, Il y avait à ses côtés, entre autres, Larbi Ben M’hidi, Krim Belkacem, Omar Ouamrane, Si M’hamed (Bouguerra), Si Sadek, Azzedine, Si Lakhdar, Ali Khodja, Ali Mellah. Alors pourquoi la vindicte et la jalousie se concentrent-elles sur lui ? Parce qu’il était un concentré des valeurs de cette Kabylie intrépide et frondeuse qui refuse toujours de se fondre dans des identités factices, de devenir arabe : intelligence, engagement, probité, sens de l’organisation, de l’honneur et de la persuasion. Cela est encore insupportable pour les hiérarques autoproclamés qui, pendant la guerre, étaent planqués à l’extérieur.
Après Ali Kafi, un homme de l’Est ayant accédé au poste de “Chef d’Etat” après l’asassinat du Président Boudiaf en 1992, qui a écrit un livre dans lequel il a méthodiquement minoré l’action révolutionnaire de Abane, allant jusqu’à l’accuser d’intelligence avec l’ennemi, voilà que de l’Ouest cette fois, un certain Benachenhou, inconnu au bataillon de la Guerre, néanmois memebre du Sérail actuel, joint sa voix à la curée. Dans une bouffée irrésistible de haine, il déclare que Abane Ramdane “serait resté un secrétaire de mairie sans Messali”. Admettons qu’à un certain moment, Messali eut pu paraître avant la guerre d’indépendance une référence à Abane. Y a-t-il là matière à orgueil pour M. Benachenhou ? Doit-on lui rappeler que sans les Kabyles qui lui ont généreusement offert la Présidence de l’ENA, Messali serait resté un inconnu de l’Histoire ? Au lieu de dénoncer les assassins de Abane qui ont ourdi leur forfait dans la honte et le secret, ces falsificateurs s’emploient à glorifier et légitimer ses meurtriers.
Il n’est nul besoin pour nous de défendre Abane ; son parcours militant et les sacrifices qu’il a consentis pour la Libération de l’Algérie sont les sentinelles imprenables de sa mémoire.
Mais inutile de se voiler la face. À travers Abane, le faisceau d’attaques frontales ou sournoises des arabo-islamiques vise la Kabylie qui a pris résolument la voie de son émancipation politique, économique et culturelle.
Fort heureusement, il n’y a pas que des nihilistes dans ce pays. En août 2006, Abed Charef écrivait dans le Quotidien d’Oran : « Il y a un demi-siècle, en pleine guerre, dans la clandestinité, le Congrès de la Soummam a réussi à apporter les réponses à ces questions centrales qui se posaient alors au pays. Aujourd’hui, la seule commémoration qui en vaille la peine, la seule manière d’honorer ces géants qui ont adopté la plateforme de la Soummam, est celle qui permettrait de débattre de ces questions, d’élaborer des réponses et d’en engager la réalisation. Le reste, tout le reste, n’est qu’un rituel djahilien destiné à contrer le sens de l’Histoire ».
Plus loin encore, en 1941, Mme Messali, née Émilie Busquant écrivit à son mari alors en prison ce qui suit : « n’accepte pas de donner ta signature, le peuple algérien est avec toi et s’il le faut, je mettrai les enfants chez des amis et j’irai en Kabylie pour prendre le maquis ».
Eh oui ! N’en déplaise à tous les détracteurs, c’est en Kabylie, le pays natal de Abane, qu’il fallait prendre le maquis car c’est là-bas que s’est forgée la conscience révolutionnaire depuis l’occupation coloniale. Il faut rendre grâce à Mme Messali, française de souche, qui reconnaît sans aucune fioriture le rôle de bastion révolutionnaire de la Kabylie depuis des temps immémoriaux.
Pour ce qui est du rôle prétendument joué par Abane pour écarter Messali, la vérité est qu’il était évident que celui qui cultivait sa propre idolâtrie au point de proposer à des militants fragiles et crédules les poils de sa barbe comme reliques sacrées, n’avait plus rien à voir avec une révolution qui s’inspirait des expériences du monde moderne. Et il allait de soi que le statu quo mortel incarné par Messali allait être dépassé. Cette dynamique salvatrice de mouvement qui devait outrepasser les positions acquises s’imposait par elle-même et ni Abane pas plus qu’un autre n’eut pu l’arrêter dès lors qu’elle était portée par le peuple kabyle.
Cette nouvelle polémique sur Abane est l’expression officielle d’un antikabylisme algérien qui avance à visage découvert.
Le 29 septembre 2008 Ferhat Mehenni et Muhend Loukad